Compagnie néerlandaise des Indes occidentales, Dutch West India Company

La WIC, Compagnie néerlandaise des Indes occidentales

April 26, 2023

Rafaël Thiebaut

La Westindische Compagnie (WIC) ou Compagnie néerlandaise des Indes occidentales, détient le monopole du commerce et de la guerre dans l’Atlantique entre 1624 et 1674, puis, après sa refondation, entre 1674 et 1738, et subsiste en tant qu’entité juridique jusqu’en 1791. Son activité principale se concentre progressivement sur la traite esclavagiste ; la compagnie réalisant le quart de la traite néerlandaise.

La première WIC (1624-1674)

Pendant la guerre de Quatre-Vingts Ans avec l’Espagne des Habsbourg, la République néerlandaise poursuit ses activités commerciales à l’échelle mondiale. Il s’agit d’activités commerciales de type privé. Mais la concurrence entre les marchands néerlandais et les violents affrontements avec leurs ennemis jurés, l’Espagne et le Portugal, ont conduits à opter pour la création d’une seule et même Compagnie.

À la fin de la Trêve de Douze Ans, en 1621, la WIC est créée sur le modèle de la VOC (Compagnie néerlandaise des Indes orientales), avec cinq chambres représentant les provinces maritimes néerlandaises et dix-neuf directeurs. Mais il s’est avéré difficile de trouver des investisseurs, car les débuts de la VOC ont été très onéreux  et les risques de guerre sont élevés. Finalement, en 1623, quelque 7,1 millions de florins [98 millions d’euros] sont investis, chiffre qui est passé à 17 millions de florins [211 millions d’euros] en 1639. La compagnie obtient alors le monopole du commerce maritime, le droit de gouverner des colonies et de mener des expéditions corsaires dans l’Atlantique. Toutefois, l’objet de la compagnie est avant tout commercial.

Bien qu’il s’agisse d’une société commerciale, la guerre et la conquête sont des activités importantes de la WIC. Le « Grand Plan » consiste à s’emparer des principales places fortes ibériques, comme la VOC l’a fait dans l’océan Indien. Mais la situation dans l’océan Atlantique s’avère beaucoup plus difficile qu’en Asie, car les puissances ibériques sont beaucoup plus puissantes. Cependant, grâce à quelques expéditions corsaires fructueuses, en particulier la conquête de la flotte d’argent au large de Matanzas (Cuba) par Piet Hein en 1628, elle réunit suffisamment de fonds pour conquérir le Nord du Brésil, la plus grande colonie sucrière du monde. La WIC se concentre ensuite sur l’Afrique pour contrôler la traite des esclaves en s’emparant des possessions portugaises d’Elmina en 1637 et de Luanda en 1641.

La WIC devient ainsi la plus puissante compagnie commerciale et de traite, avec 53 600 captifs africains vendus entre 1658 et 1674. Mais l’expansion de l’empire colonial, qui doit être régulièrement approvisionné, défendu et gouverné, alourdit le fardeau financier et administratif des dix-neuf directeurs. Le projet s’avère trop ambitieux et trop risqué pour une société commerciale. Par ailleurs, l’impossibilité de conserver le monopole du commerce dans le monde atlantique face à la VOC constitue un autre problème. De plus, la WIC ne dispose pas de la capacité et des moyens financiers nécessaires pour assurer la traite des esclaves ou les flux de denrées alimentaires du Brésil. C’est pourquoi il est rapidement décidé que les activités commerciales privées vers le Brésil sont autorisées moyennant une taxe sur les marchandises.

Le Brésil, d’ailleurs, s’est avéré trop difficile à coloniser en raison de son état de rébellion quasi permanent. Après le départ de son dynamique gouverneur, Johan Maurits van Nassau, et l’afflux de 25 000 esclaves jusqu’en 1645, les Néerlandais perdent le contrôle de ce marché et, après de multiples tentatives très coûteuses, la WIC perd la colonie en 1654. Elle se consacre alors à la traite des captifs africains vers les colonies anglaises, françaises et espagnoles des Caraïbes, mais ses dettes s’élèvent à 36 millions de florins et elle décide en 1674 de cesser ses activités et de transférer toutes ses actions et ses colonies à une nouvelle société dotée d’une nouvelle charte.

À cette époque, la WIC contrôle différents territoires en Amérique. Les Nouveaux-Pays-Bas, situés entre les colonies britanniques de Virginie et de Nouvelle-Angleterre en Amérique du Nord, qui jouent un rôle important dans le commerce des fourrures et la culture du tabac, sont cédés aux Anglais en 1667, en échange du Suriname. Ce territoire de la Côte Sauvage, appelé Guyane, n’est, officiellement, pas occupé par les puissances ibériques et les Néerlandais y établissent également les colonies d’Essequibo et de Berbice, qui produisent du tabac et du coton. Dans les Caraïbes, les îles d’Aruba, de Saint-Eustache et de Curaçao sont conquises dans les années 1630. Curaçao, en particulier, devient une plaque tournante régionale d’importance pour la traite esclavagiste, officielle ou clandestine, avec les Amériques espagnoles.

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Paysage au Brésil, Frans Jansz Post, 1652, © Rijksmuseum Amsterdam À partir de 1630, la Compagnie néerlandaise des Indes occidentales (WIC) conquiert une partie du du Brésil. Les Néerlandais reprennent la production de sucre. Le sucre est cultivé dans des plantations, comme celle que l'on voit sur ce tableau. Des Africains asservis y travaillent dans des conditions misérables. Ce qui est présenté comme une idylle pour les Néerlandais est en fait une réalité infernale pour eux.

La deuxième WIC (1674-1738-1791)

En 1674, la nouvelle compagnie dispose d’un capital existant de 1,2 million de florins [13,7 millions d’euros] et de 4,6 millions de florins [52,6 millions d’euros] en actions nouvelles. Il n’y a que dix administrateurs, mais pour le reste, elle ressemble beaucoup à l’ancienne compagnie. En 1700, la compagnie a déjà enregistré 2 millions de florins de pertes. L’Afrique est devenue la possession la plus importante de la deuxième WIC, d’abord pour le commerce de l’ivoire et de l’or, mais aussi et surtout pour la traite des captifs africains. La Côte d’Or est au cœur de cet empire, mais son exploitation s’avère difficile en raison de la forte concurrence des Anglais et des Français, ainsi que des conditions de vie insalubres.

Malgré cela, la WIC effectue la traite de quelque 140 000 personnes entre 1624 et 1738, dont la plupart vers les colonies néerlandaises et les îles antillaises étrangères. La nouvelle WIC ne dispose pas de moyens financiers suffisants pour rivaliser avec les autres nations européennes dans le domaine de la traite esclavagiste et elle a des difficultés à combattre les contrebandiers hollandais, appelés lorrendraaiers. Ces marchands d’esclaves en situation illégale représentent près d’un quart du commerce néerlandais total, avec plus de 40 000 captifs africains vendus, principalement à Saint-Eustache et dans des colonies étrangères. La situation financière de la WIC est alors devenue critique. En 1738, elle décide de renoncer à son monopole sur la traite des esclaves en Afrique de l’Ouest, notamment en raison de la chute des prix du sucre et des retards de paiement des planteurs, qui totalisent une dette de 4 millions de florins.

Dès lors, la compagnie joue un rôle d’intermédiaire dans la traite grâce à ses forteresses africaines, en particulier Elmina. Mais la situation financière se dégrade en raison des guerres et de la concurrence en Afrique de l’Ouest. Jusqu’à sa disparition, il lui est impossible d’investir dans des activités commerciales, même les plus élémentaires. La WIC ne fait des bénéfices que lorsque les autres Européens sont en situation de guerre ; aussi lorsque les Anglais déclarent la guerre à la République néerlandaise en 1780, c’est le début de la fin. En 1791, il est décidé de dissoudre la société plutôt que de la conserver, et ses biens sont transférés à l’État.

Translate by Christine Renard

 

 

 

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Bateaux à l’ancre sur la côte, Willem van de Velde, environ 1660, huile sur toile, © Rijksmuseum Amsterdam

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À propos de l’auteur

 

Françoise Le Jeune est professeur en histoire et civilisation nord-américaine et britannique à Nantes Université. Ses recherches sur l’empire britannique aux 18e-19e siècles, et sur l’espace atlantique des révolutions, s’inscrivent dans l’axe 1 du Centre de Recherche en Histoire Internationale et Atlantique (CRHIA).

Bibliographie

B. Brommer & H. Den Heijer (dir.), 2011-2012, Grote atlas van de West-Indische Compagnie, 2 vol., Voorburg : Atlas maior.

P.C. Emmer, 2020, Geschiedenis van de Nederlandse slavenhandel, Amsterdam, Nieuw Amsterdam.

H. Den Heijer, 1997, Goud, ivoor en slaven. Scheepvaart en handel van de Tweede Westindische Compagnie op Afrika, 1674-1740, Zutphen, Walburg. 

R. Paesie, 2008, Lorrendrayen op Africa: de illegale goederen- en slavenhandel op West-Afrika tijdens het achttiende-eeuwse handelsmonopolie van de West-Indische Compagnie, 1700-1734, Amsterdam : De Bataafsche Leeuw.

J.M. Postma, 1992, The Dutch in the Atlantic slave trade Les Néérlandais et la traite transatlantique  1600-1815, Cambridge : Cambridge University Press.

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